Faire le tour du monde dans son lit, inviter les pays chez soi, habiter à l’étranger, ou comment voyager sans polluer

Hou comme ils m’énervent ! J’en croise plein, des pseudos gens de gauche voire d’extrême-gauche – d’après leurs déclarations – qui passent leur temps à faire le tour de la terre. En faisant le tour de la terre, en voyageant sans cesse, ils :

  • polluent le ciel
  • consomment énormément d’énergie – du pétrole surtout, mais aussi de l’électricité (nucléaire, charbon etc, suivant les régions)
  • profitent de toutes les cultures qu’ils traversent, en général sans rien leur apporter
  • se croient chez eux partout, comme de parfaits colons
  • gâchent énormément d’argent

Bref. Découvrir le monde, s’ouvrir aux autres, c’est super. Mais détruire le monde sous prétexte de le visiter – et fermer les yeux, 40 ans après les premières alertes à la crise écologique lancées par des militants et des scientifiques responsables et courageux, et alors que tous les signaux sont au rouge, sur le fait que les modes de vie occidentalisés tuent la terre, les cultures et la vie, ça n’est pas du tout d’accord.

Perso, j’ai à la fois très peu et énormément voyagé.

Physiquement, j’ai déménagé une vingtaine de fois en un peu moins de 20 ans, on peut donc dire que j’ai le même syndrome de bougeotte que ces saletés de touristes profiteurs. J’ai bougé d’une ville de France à l’autre (Chaumont Grenoble Nancy Montpellier Lille Marseille), dans ces villes d’un quartier à un autre (genre, 4 adresses à Marseille, dans les 16è, 4è, 5è, et 1er arrondissements), et de là à Berlin (où j’ai déjà eu 4 adresses aussi en 4 ans, 2 à Kreuzberg, une à Neukölln et une à Prenzlauerberg). Le truc donc, c’est que je ne visite pas les endroits comme un touriste, je viens y vivre, en faire partie, comme un animal migrateur.

C’est surtout par la culture et par l’esprit que j’ai voyagé : en lisant un gros dictionnaire de culture arabo-musulmane, une histoire du Japon, une histoire de l’Asie centrale, une histoire des peuples amérindiens, j’ai voyagé dans le temps, l’espace et les cultures, quasiment sans coûter un centime, sans dépenser aucune énergie, et sans pour autant perdre une miette de l’effet de dépaysement recherché.

J’ai aussi apprécié apprendre et parler des langues – j’ai appris le français, l’anglais et l’italien à l’école, fait un peu d’arabe en fac, un peu d’allemand et d’espagnol en solo.

Une fois à Berlin, j’ai tenu un lieu alternatif, underground. Là, j’ai organisé des soirées « Überall around the world ». Visites thématiques des cultures musicales, gastronomiques et alcooliques du monde. Y’en a pas eu des centaines non plus, mais les soirées scandinaves ou latino-américaines par exemple ont été de très bons moments (sauf que le tabac à priser des suédois m’a filé la nausée direct !! j’ai revendu mon « snuus » à un français qui y était accro – en Allemagne c’est interdit à la vente car c’est vraiment de la merde).

Bon, mais tout ça est encore assez classique comme manière de voyager sans détruire le monde.

Ma technique préférée, que je n’ai utilisée qu’à Berlin parce qu’en France l’occasion ne se présentait pas (la France se plaint de ses migrants mais en réalité y’a relativement peu d’étrangers en France, Berlin qui accueille des gens en provenance de 160 pays différents offre sacrément plus de cosmopolitisme ! Par exemple en France j’avais jamais rencontré une fille de l’ethnie Tigrinia (??) venue d’Ethiopie, alors qu’à Berlin, si 🙂 c’était la copine d’un ami saxophoniste français, un musicien génial qui joue du free jazz sur DEUX saxos simultanément… incroyable mais vrai, et superbe. Passons, c’est pas le sujet), ma technique préférée disais-je c’est de faire le tour du monde à partir de mon lit, en y rencontrant des partenaires amoureuses venues du monde entier.

Alors, voici, pour le fun, pour montrer un bel exemple d’hédonisme international cheap, accessible à tous, facile, agréable, et totalement non-destructif, voici une petite liste des pays et des cultures que j’ai traversés grâce à mes copines :

  • France. Bon, c’est la majorité, et donc on s’en fout.
  • Allemagne.
    • Anna graphiste venue de Hambourg,
    • Lisa actrice venue de Cologne,
    • Eva étudiante en cinéma venue de Münich,
    • Eva artiste paumée venue de Kiel,
    • et Angelika une femme de 42 ans, versée dans les phytothérapies, qui venait de l’Est et avait grandi sous le communisme.
    • Y’en a une autre je sais plus d’où elle était, ça n’a pas duré longtemps.
    • Ah, encore une autre, un cas incroyable : Dana, une comptable communiste aussi née à l’Est que j’ai fréquentée en tant que sex-friend, deal très clair, relation très saine ! ça a effectivement commencé sex-friends, mais on n’a pas pu s’empêcher de discuter de tout…
  • Angleterre. Londres, Londres, et Londres, à croire qu’y’a pas d’autre ville. L’une, Katherine, était éditrice d’un magazine culturel, l’autre, Kiruba, prof d’anglais, la troisième Samantha journaliste à l’exBerliner (magazine culturel berlinois).
  • Espagne.
    • Elena, excellente flûtiste et chanteuse de Barcelone, plus précisément.
    • Et Marion, une régisseuse de théâtre qui parlait super bien français.
  • Finlande. Sofia, jeune femme magnifique, super dessinatrice, elle faisait des études du style biologie marine et, par la suite, fit un long voyage déprimant dans le froid et la nuit polaires… (C’est la femme dont parle mon poème Finland is hot)
  • Norvège. Mais pas une richarde, Iris, une alternative au style plutôt gothique et aux idées plutôt anar, je l’ai bien aimée.
  • Portugal. Inès, elle ne correspondait d’ailleurs pas du tout aux stéréotypes racistes qu’ont les français contre les « portuguesh » : cheveux châtain, des airs de femme-enfant. Elle était danseuse (elle doit l’être toujours !)
  • Corée. (En fait, coréenne elle avait été adoptée à 2 ans par une famille française : physique coréen donc (1m52 !!), mais culture intégralement française, petite-bourgeoise de la région parisienne (rencontrée à Montpellier).
  • Japon. Izumi, une femme qui à ce que j’ai compris est plus ou moins call-girl là-bas chez elle – elle est payée pour passer des soirées dans des bars ou restaus avec des clients friqués – elle nous disait qu’elle pouvait se faire 600€ par soirée… Pas terrible au pieu d’ailleurs, passive et froide.
  • Etats-Unis. Bizarrement, j’ai jamais eu aucune relation avec une américaine blanche, je dois être raciste anti-blancs ? J’ai eu deux copines noires, l’une, écrivaine, Isabell, qui a grandi entre Chicago et Portland (fille d’un militant historique Black Panther, on en a beaucoup parlé, on a regardé des documentaires, son père a échappé à l’assassinat du célèbre leader Fred Compton, ils dormaient dans la même pièce quand une vingtaine de fascistes policiers armés de mitraillettes sont entrés dans la pièce et ont canardé tout le monde, faisait plusieurs morts.) L’autre, Asoka, était aussi écrivaine, et en fait elle était la fille d’un Nigérian et d’une Américaine.
  • Israël, 2 aussi.
    • L’une, Mary, était chanteuse-guitariste-compositrice (cf ma chanson This Is A Call : c’est elle qui chante).
    • L’autre, Moran, performeuse géniale (elle fabrique des costumes de monstres et joue des pièces fascinantes en solo ainsi déguisée…) Je ne comprends vraiment pas les antisémites, ces femmes étaient tout à fait normales, comme toutes les autres.
  • Danemark. Ah, ma chère petite Veronika, la photographe…
  • Italie. Francesca, réalisatrice.
  • Canada. Shasta, violoniste francophone qui avait un excellent niveau, elle avait reçu des prix, ado… Et Renée une consœur écrivaine qui a elle aussi eu des prix, décidément, on collectionne.
  • Belgique. Nelle-Katrine, elle a passé une nuit dans mon lit mais on n’a rien fait : en parlant, elle m’a appris qu’elle avait été violée récemment par son ex-copain, elle avait besoin de tendresse, pas de sexe. J’en ai pas su plus, elle n’était que de passage à Berlin. Elle était touchante…
  • Australie. Rosalie, encore une écrivaine, désolé… Non, en fait, elle fait du stand-up comedy, en écrivant ses sketches elle-même. Elle aussi a été primée jeune pour ses activités artistiques.
  • Inde. En fait, c’est la prof d’anglais de Londres citée ci-dessus, mais ses 2 parents sont Tamouls. C’est une des plus belles femmes que j’aie jamais vu de mes yeux, avec la Finlandaise. On parlait de l’Inde, quand on était ensemble, c’était intéressant, et la cuisine, bien sûr, elle s’y connaissait 🙂 Il ne faut pas que j’oublie aussi cette française, Doris, qui était d’origine indienne, rencontrée à Marseille.
  • Grèce. En fait, on s’est rencontrés avec Barbara dans une soirée à Berlin dans une ancienne piscine devenue un club techno. Je ne sais pas trop comment on en s’est retrouvés à poil dans les vestiaires, au calme… lol. Elle était architecte.
  • Pays-Bas.
    • Bon, la première c’est sacrément plus compliqué. Sally a grandi aux Pays-Bas, mais son père qu’elle n’a pas connu était irakien et sa mère palestinienne. Elle a ensuite vécu en Allemagne et ailleurs. Elle a été ma principale collaboratrice dans le lieu alternatif mentionné plus haut. Elle a pas mal de cordes à son arc : chanteuse excellente, animatrice du jeu en live qu’on a inventés ensemble, « Panda » (on a fait 3 sessions publiques, bien fréquentées, mais on a abandonné car c’était vraiment long à produire), actrice…
    • La deuxième, Fanya, était une étudiante en cinéma qui compte réaliser des films, une grande blonde bien bâtie.
  • Lettonie. Eh oui, ce petit pays que beaucoup de gens auraient du mal à situer compte pas mal de très belles femmes. On a passé pas mal de soirées avec plein de lettons et de lettonnes, ce sont des gens vraiment conviviaux et qui savent vivre de manière simple. J’ai passé un peu de temps avec une d’entre elles, Leega. Ah, y’a eu la belle Gundega aussi, mais elle elle avait pas le droit de fricoter avec moi parce qu’elle avait un mec.
  • Y’a eu aussi tous mes ratés, notamment Marina cette artiste ukrainienne super attirante, le courant passait bien mais elle était déjà en couple.

Voilà, bon, je passe sur des rencontres très éphémères et des copines dont j’ai jamais trop su la provenance parce que j’étais trop bourré et stone pour faire la causette, et au matin j’étais plus forcément de la même humeur.

Alors, maintenant je vais faire une autre liste, rapido, des gens super que j’ai rencontrés à Berlin et qui venaient d’un peu partout dans le monde. La plupart du temps, ce sont des gens que j’ai connus parce qu’ils sont venus dans mon lieu faire la fête ou parce que je les ai invités à jouer ou encore parce qu’ils sont venus à mes nombreux workshops d’art narratif en anglais :

  • Un groupe de turbofolk letton, j’ai oublié leur nom mais ça cartonnait, la police est même venue faire la fête avec nous 😉
  • Un groupe de rock grec (mais eux ils m’ont saoulé, ils étaient pas très corrects)
  • Pin Go et Rodri Go, excellents DJ espagnols, de Majorque
  • Matheiu Ramirez, DJ venezuelien
  • Lotta Fahlen, chanteuse suédoise (très très belle), elle a été ma barwoman occasionnelle
  • William Jefferson, étudiant de Cambridge, mec très intelligent et super doué pour le storytelling qu’il comprenait immédiatement et appliquait avec une incroyable facilité – on a fait quelques séances de suivi de projet ensemble, il m’épatait – si tous les élèves étaient comme lui, l’Europe ne tarderait pas à bouter les Américains hors des écrans.
  • Iku Sakan, excellent musicien expérimental japonais
  • Levi Raphael, chanteur, musicien et improvisateur allemand
  • Mauritz, batteur allemand qui était aussi notre coworker et voisin et jouait dans le même groupe que Levi, les Mummpizz
  • Christian Koch, DJ allemand sous le nom Lenzian Kowski
  • Olivia, anglaise passionnée de mode au style incroyable, qui me tenait les vestiaires pendant les soirées d’hiver – les fringues c’est son truc
  • Uktu Tavil, musicien expérimental turc – ces deux-là jouaient aussi ensemble et ils sont géniaux
  • Tout un groupe de portugais, amis de la néerlandaise-palestinienne-irakienne mentionnée plus haut, ils sont venus à plein de soirées
  • Maurizio, guitariste, son ami guitariste aussi, très bon
  • Katia, peintre, elle était une de nos coworkeuses et une autre barwoman fréquente
  • David Croft, codeur/hacker anglais, il a été un de nos coworkers et mon barman principal, il s’est aussi investi dans SCOPE, le groupe d’artistes visuels (VJs etc) que j’ai co-fondés avec Visual Berlin, asso d’artistes visuels berlinois (majoritairement allemands, puis espagnols, puis américains)
  • Olivia, peintre australienne qui faisait des très grands formats – j’ai eu un de ses chouettes portraits d’enfant format genre 2mx2m dans ma chambre pendant presque 2 ans
  • Une dessinatrice belge, très douée, j’ai oublié son nom
  • Diego, jeune mexicain qui m’a beaucoup parlé de son pays – la politique, la violence, la littérature…
  • Alex Robbins, un graphiste anglais génial, qui bosse pour des trucs très prestigieux genre le Times ou Newsweek ou Wired, c’était un autre de nos coworkers
  • Ruby Russell, éditrice de magazine culturel, encore une coworkeuse
  • Tom Breseman, poète allemand qui est une sorte de frère spirituel pour moi
  • Il faut que je les cite aussi : dans les parcs, en allant acheter de la beuh, j’ai rencontrés plein d’africains. C’est pas toujours facile de causer, mais y’en a certains avec qui j’ai pu discuter. Beaucoup de dealers à Berlin viennent d’Afrique de l’Ouest et sont francophones. Ils viennent de Gambie, Sénégal, Côte d’Ivoire, Guinée. Quelques Jamaïcains aussi.
  • Une fois dans le métro je me suis aussi mis à discuter avec 3 jeunes égyptiens, on a parlé des événements place Tahrir, ils étaient bien sympas.

Bon, bien sûr, c’est sans compter tous les français expatriés ou de passage que j’ai également rencontrés à Berlin, et qui d’ici me faisaient revenir en France par l’esprit et la dialogue, ironie de l’histoire. J’ai rencontré des sacrés talents :

  • Antoine Villoutreix, Auteur-compositeur-interprête
  • Diane Chaudouet, superbe photographe
  • Maxime Bobo, le saxophoniste dont je parlais plus haut
  • Cassandre, une danseuse qui m’a fait un coup de pute, mais je crois qu’elle était bonne en danse
  • Sonia, dessinatrice
  • Sébastien Bourdeauduq, ingénieur sorti d’Eletrotechnique, inventeur de la Mylmymist, une machine à effets visuels, et organisateur d’un événement geek international et de haut niveau
  • Julien Debmaster, musicien électro génial
  • Florian Froeger, excellent DJ

Tous ces gens que je viens de citer ce sont ceux qui m’ont marqué, mais j’en ai croisé des centaines d’autres. Eux, ils sont parfois venus de loin mais moi, pour les rencontrer, une fois à Berlin ça ne m’a plus coûté un centime. On peut dire que j’ai sillonné la terre entière non ? Pourtant, je n’ai jamais pris le bateau. J’ai pris l’avion une seule fois. Je suis venu à Berlin en voiture de location, avec toutes mes affaires qui tenaient dans une Opel Astra break. Pour toutes les soirées que j’ai faites où j’ai rencontré ces centaines de gens passionnants, et ces femmes avec qui il y a eu des rapports d’attirance réciproque, même quand ça n’était pas fait pour durer, je n’ai pas eu à acheter un seul ticket de métro, ni à dépenser une seule goutte d’essence, puisque ça se passait chez moi.

Voilà, je pense avoir démontré qu’on peut vivre une vie ouverte aux 4 vents sans tuer d’animaux, sans fabriquer d’aéroports, sans provoquer de marées noires, sans dégazer en haute mer, sans envahir des pays où on est pas forcément les bienvenus. On peut apprendre énormément d’autrui, on peut s’amuser, boire, fumer, jouir, avec la terre entière, sans devenir pour autant un foutu touriste. C’est Air France non, qui avait pour slogan publicitaire « le monde vous appartient » ? Ils voulaient juste de l’argent, en disant ça. Moi j’ai eu le monde, sans considérer qu’il m’appartenait, et sans financer Air France.

Faites comme moi, voyagez par les gens, par l’art et par l’amour.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *