Lettre publique à Booba le petit ourson à propos de ses chansons, de sa politique et de sa morale

Salut bro’ ! ça boom-boom ?

1/ Tes chansons

Bon, toi je t’écris d’abord pour te faire savoir – je ne doute pas que ça t’intéresse grave de chez grave – que j’adore ton dernier album « FUTUR », aux paroles qui font mouche à chaque ligne et aux orchestrations envoûtantes et puissantes.

Mes préférées sont :

Tombé pour elle

Un texte vraiment énorme, grandiose : l’allégorie qui fait de la rue une femme pour qui tu tombes est génialement trouvée.

Jimmy

Laisse tomber, je connais tout ça, ça me fait penser à là d’où je viens.

« Jimmy est arrivé
En France croyant trouver
Liberté égalité
Mais en réalité
Contrôles d’identité
Violences policières
Jimmy a tout de suite pigé
Qu’il faudrait niquer des mères »

Kalash

Celle-là est ultra-violente comme son nom l’indique, d’une violence symbolique que je classe en fait du côté de la légitime-défense, après les millions d’agressions subies par les migrants installés en France et tous les pauvres que la France exploite y compris en leur louant pendant 50 ans des HLMs qui ne valent rien , sans aucun scrupule – l’État français exploite les pauvres sous prétexte de charité, inscrit le mot égalité sur la carte d’identité des millions de gens qu’il discrimine au quotidien.

J’adore le passage hardcore chanté par Kaaris :

« 2.7.0. toujours plus haut, la République me suce le tuyau
Monsieur l’agent j’t’enfonce le triangle *Sevran !* et le gilet fluo
J’veux faire des sous mais j’suis paresseux
J’aime pas ta gueule j’te baise ta reu-ssœu
J’n’ai qu’confiance qu’en mon Desert Eagle
Et en Zizou dans les arrêts d’jeu
Elle est dans la chambre, elle est sous les draps *hum hum*
J’ai des jambes à la place des bras
Elle pense que j’suis en train d’la doigter *hum hum*
J’lui mets mon gros doigt d’pied
Mes deux questions préférées :
Qu’est-ce que j’vais faire de tous ces deniers ?
Si j’te fends le crâne en deux, quel œil va s’fermer le premier ?
Continue à glousser, j’te fume et j’roule un trois feuilles
Tes ongles continuent à pousser tu pourras griffer ton cercueil (2.7.)
J’ai la prose qui tue et même ton corps reconstitué
On n’sait toujours pas qui tu es, ta grand-mère la prostituée »

Moi quand j’entends tout ça je ne trouve pas ça violent, je trouve ça plutôt très drôle, la violence verbale poussée à l’extrême devient facilement clownesque et fait l’effet inverse.

Je vais pas passer cet article à faire l’éloge de tes chansons, elles sont superbes.

Ceci étant dit, il ne me reste plus qu’à te faire ta fête.

2/ Ta politique et ta morale

Tu fais un excellent parolier-chanteur, et un bien piètre politicien-moraliste. J’ai pas besoin que tu m’expliques ta logique de provoc’ à outrance : j’apprécie ton style. Là où ça ne va plus du tout, c’est dans ce que tu fais de ton argent et de ton succès, à quoi tu les fais servir.

Donc, en permanence, dans des dizaines de vers, tu frimes en sortant ton fric, tes biens et tes armes.

On pige l’idée comme quoi ces thèmes sont précisément le retournement symbolique du réel dont tu as été victime comme des millions d’autres, enfermés dans ces cages à lapin françaises, discriminés par l’Éducation nationale, exclus des professions perçues comme nobles, calomniés en permanence par les politiciens et les médias, criminalisés à outrance, accusés d’être les causes des violences du système qu’ils subissent. T’as pas besoin de nous l’expliquer, on sait.

Là où je ne te pige plus du tout c’est que, une fois que tu as réussi par ton talent à t’en sortir, tu ne fais rien d’autre que réaffirmer toutes les valeurs dominantes du système que tu insultes, et là franchement, tu passes pour un gros guignol de cirque, ami ourson que ton fric tient fermement en laisse.

Tu te comportes pile-poil comme un bankster, un capitaliste vaniteux, un technocrate de la zique.

Avec ta thune, tu fais quoi ? Tu t’achètes des bagnoles, des armes, une résidence à Miami Florida USA ? Les gens comme Jérôme Kerviel, Oscar Pistorius, Nicolas Sarkozy, Serge Dassault, Lance Armstrong, Gérard Depardieu, ne se comportent pas différemment. Tu es content, breton sénégalais, d’avoir pu accéder au même niveau d’égoïsme que ces grands requins blancs ?

En réalité en faisant briller tes lingots devant nos yeux pas du tout ébahis, tu ne fais rien d’autre que vanter le pire capitalisme, faire gagner du fric aux déjà-riches et ajouter ton pseudonyme à une longue liste d’enfoirés.

En réalité pas mal de tes provocs schlinguent le conformisme et la merde, et prouvent de manière flagrante que tu ne sais, pour l’instant, faire preuve d’aucune inventivité économique.

Il y a bien des choses que tu pourrais faire avec tes millions. En France, tu pourrais racheter des immeubles dans le « 9-2 », payer le loyer de familles plongées dans le malheur, venir en aide à des gamins qui vivent ce que tu as vécu il y a 20 ans, ouvrir des commerces en banlieue et les confier en gestion à des jeunes méritants, faire de la réinsertion de jeunes gens sortis de prison, financer des labels indépendants, payer des animateurs d’ateliers d’écriture rap.

Au Sénégal aussi tu pourrais faire servir ton argent à améliorer le monde, favoriser et valoriser leurs cultures, leurs langues, leurs arts, leurs politiques, bref, tu pourrais faire un million de choses avec tes millions.

Or ce qu’on voit de toi, ce que tu montres à tout le monde, c’est que tu te comportes comme un bon petit français moyen, que tu adhères à toutes les valeurs les plus bas-de-gamme et que tu n’apportes strictement rien de positif à tes milieux sociaux d’origine.

De même à chaque fois que tu sors une super vanne misogyne ou homophobe tu te ranges aux côtés des ultra-catholiques, de l’extrême-droite réactionnaire, de la droite conservatrice, des violeurs ordinaires, bref, tu t’assimiles toi-même à une sacrée bande de blaireaux. C’est ça ta famille politique, Winnie ?

Tu nous montres un corps très puissant, une musculature impressionnante, mais j’aimerais assez avoir l’avis d’une de tes partenaires sexuelles, si tu en as. La virilité peut en attirer certaines, mais en général elles ne sont pas fan de la bêtise masculine (il y a des exceptions) et elles apprécient la douceur et les attentions touchantes – les purs coups de boule et les pires coups de bite en général ça leur plaît moins – t’es au courant ou faudra refaire aussi ton éducation sexuelle en repartant de zéro ? 🙂

Pour finir, mon doux ourson… ton album, je l’ai écouté des dizaines de fois déjà, mais je ne l’ai pas acheté et je tiens à te faire savoir publiquement que je ne te filerai pas un rond, tu peux aller te faire enculer par Babar l’éléphant et te faire fister ton fion tatoué par Dorothée et les Musclés.

Vu que t’es déjà bien gavé et que si on te confie de la thune tu la rends malfaisante ou inutile, t’as tout simplement pas mérité d’en avoir, t’es pire que Goldmann-Sachs !!!

Voilà, qui a niqué qui là mon gros nigaud ? 🙂

Une seule arme, les mots et les idées. Merde, ça fait deux armes. Mange.

Eh ouais mec, y’a des rebelles qui sonnent vrai, qui font ce qu’ils disent et qui disent ce qu’ils font.

Eux n’investissent par leur argent chez Universal Music et ne signent jamais un seul contrat avec une Major. Tu préfères signer des albums de résistant, ou des albums de collabo ?

PS : au fait y’a un truc que j’arrive pas à éclaircir. Dans ta chanson « 2PAC », un de tes vers dit « il est minuit sur la Haute-Marne ». C’est très curieux car je viens de ce département merdique dont on n’entend jamais parler (sauf comme poubelle nucléaire). Qu’est-ce que ça fout dans ta chanson ???

PS2 : bizarrement, j’ai écrit cet article pile le jour de son anniversaire, par pure coïncidence… Alors du coup :

 

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